Le cas du Département de Français – ESLE, Université de Hué [1]
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ESLE Université de Hué
1. Initiation à l’évaluation
C’est en l’année 1989-1990 au CIEP (Sèvres), dans le cadre d’un stage de formation de formateurs que j’ai été initiée à l’évaluation, avec Mme Suzanne Beaudet comme formatrice-experte. Notre tâche consiste alors à nous doter de quelques notions de base en évaluation, et surtout à croiser nos réflexions et expériences avec d’autres dans un atelier de découverte et d’élaboration d’outils d’évaluation, au service d’une méthode de français conçue à la même époque par une équipe bilatérale de Français-Vietnamiens, destinée à un public de jeunes collégiens et lycéens vietnamiens, méthode qui sera mise en usage dans la totalité du Vietnam depuis la rentrée 1990.
2. L’évaluation comme module en formation universitaire et post-universitaire
De retour au Vietnam, j’ai réussi en 1991 à insérer dans la formation initiale des enseignants de français le module «Évaluation en FLE» (de 2 UV). Depuis 2001, j’ai laissé la charge de ce module à une autre collègue, pour m’occuper d’un module d’évaluation de 3 UV en formation post-universitaire (Thac Si, équivalent au Master 2), avec un public constitué majoritairement d’enseignants de français de lycée et de collège.
3. Le vécu en évaluation en milieu universitaire
Pourtant ce vécu en évaluation n’est pas partagé par tous les collègues de mon département. Si quelques-uns ont eu de part et d’autre l’occasion d’être sensibilisés à l’évaluation et ont pris la peine d’améliorer leur pratique en évaluation, d’autres se contentent, même aujourd’hui, des chemins battus et restent insensibles à des mutations dans le domaine de la méthodologie de l’enseignement / apprentissage du FLE et du FLS, dont les nouvelles orientations de l’évaluation, d’une évaluation non seulement sommative mais aussi formative. De même pour les distinctions opérationnelles entre évaluation initiale, évaluation continue et évaluation finale, entre évaluation normative, évaluation critériée et évaluation personnalisée, les relations interactionnelles entre objectif, formation et évaluation, les critères d’une bonne évaluation, à savoir l’objectivité, la fidélité, la validité..., tous ces aspects leur restent inconnus et semblent malheureusement sans aucun intérêt.
À vrai dire, comme Monsieur Jourdain qui « fait de la prose sans le savoir », tout enseignant-formateur pratique de l’évaluation formative sans s’en rendre compte, et est plus ou moins sensible à des exigences d’une évaluation pertinente sans en être vraiment conscient. Pourtant la prise en compte de manière consciente de ces aspects instrumentaux permettra à tout un chacun de maîtriser sa pratique en évaluation, d’expliciter des formes jusqu’ici implicites, et plus d’efficacité dans son savoir-faire et son savoir-être.
Depuis septembre 2007, la mise en usage au niveau universitaire du Vietnam d’une nouvelle méthode de français intitulée «Tout va bien» (Éd. Clé International), à commencer par la 1re année des départements de français, a amené les enseignants-formateurs qui enseignent dans ces classes à faire face au portfolio accompagnant la méthode, que les concepteurs proposent à 3 niveaux, correspondant à 3 niveaux d’apprentissage. La plupart des enseignants-formateurs de mon département qui enseignent à la 1re année ont tenté de faire faire les exercices et tests du portfolio aux étudiants, tout en étant conscients qu’il s’agit là d’une forme d’évaluation formative, d’auto- et de co-évaluation. Pourtant l’articulation entre différents enseignants-formateurs reste absente, et bien que le 1er semestre se soit écoulé il y a un certain temps déjà, une sérieuse «évaluation» de cette mise en pratique du portfolio n’a pas pu être effectuée.
Un autre aspect qui laisse à désirer : un manque d’interdisciplinarité et un certain cloisonnement dans la pratique de certains collègues. Nombreux sont ceux qui se contentent de (trop) valoriser leur(s) «spécialité(s)», qui refusent de les soumettre à l’objectif final, c.a.d. la formation initiale des enseignants de français. En effet, on n’enseigne pas de la même façon la linguistique, la littérature à des publics de futurs linguistes, de futurs littéraires et de futurs enseignants de français. Former des enseignants de français revient à tous les enseignants-formateurs comme un objectif final auquel ils doivent rester attachés, une sorte de fil d’Ariane leur permettant de se tenir sur «le bon chemin».
4. L’évaluation dans la formation continue des enseignants
Pour ce qui est de la formation continue des enseignants de français, je fais partie des formateurs qui s’occupent très souvent du domaine de l’évaluation, dans le cadre des stages nationaux, régionaux «macro» (c.a.d. du Sud-Est asiatique) et régionaux «micro» (c.a.d. de la région du Centre du Vietnam). Le public se compose d’enseignants de lycées et de collèges de tout cursus, dont ceux des classes bilingues. L’accent a été mis sur la validité des instruments d’évaluation (pour de l’évaluation sommative), et tout récemment, en été 2007, sur le portfolio (pour de l’évaluation formative), en passant par des outils tels que des fiches de compétences, des fiches d’auto-évaluation, des pages d’autodiagnostic (méthode «Bravo 1», Éd. Didier)... À mon sens, suite à ces stages, la pratique en évaluation des enseignants de lycée et de collège (dont des enseignants des classes bilingues) se trouve plus ou moins améliorée et satisfaisante. Pour les enseignants en français, la tâche nous sera attribuée prochainement, éventuellement en été 2008, d’organiser un stage de formation continue pour eux: d’où un souci pour l’aspect formatif et formateur du stage, pour le contenu tout comme pour l’évaluation à différents moments : initiale, continue et finale.
5. Vers le e-portfolio
Pour le e-portfolio, c’est en cette occasion de Colloque «Innover en français» que j’ai pris connaissance de cette forme numérique ou électronique du portfolio. Puisque je me suis engagée dans la co-animation de l’atelier portant sur les ressources multimédia, et tout particulièrement sur le e-portfolio, j’en parlerai plus en détail dans le cadre de l’atelier en question. Un souci pourtant, que j’aimerais partager avec vous, c’est : comment-faire pour implanter le e-portfolio dans ma pratique professionnelle, qu’il s’agisse de e-portfolio de l’apprenant ou de e-portfolio de l’enseignant, ou de e-portfolio de la formation ?
Pour conclure
J’espère que les collègues ici présents, enseignants de et en français des classes bilingues ou non, tout comme ceux de mon département de Français (ESLE de Hué) partagent avec moi ce souci en évaluation, pour une meilleure maîtrise des outils d’évaluation, et pour plus d’articulation, d’interdisciplinarité et d’interaction dans nos pratiques professionnelles, afin de nous cultiver ensemble une véritable Culture de l’évaluation.
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Documents de référence
- Portfolios 1-2-3 de « Tout va bien ! », Ed. Clé International
- «Bravo 1», Ed. Didier
- Référentiels de stages de formation continue
- «Méthodologie de l’enseignement / apprentissage du FLE – Évaluation», Pham thi Anh Nga, Hué 2002 (formation post-universitaire)
Sitographie
http://thot.cursus.edu/rubrique.asp?no=23145
http://www.robertbibeau.ca/portfolio.html#1
http://greco.grenet.fr/webgreco/wordpress/simple.php?p=295&m=200601
Note:
[1] Témoignage du point de vue de la formation initiale et continue des enseignants de français (dont ceux des classes bilingues) et des enseignants en français (de mathématiques, de physique).
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